2 juin 2012

Le problème de la conservation et la transmission des semences aux générations futures a toujours préoccupé l’humanité, et les débats constants autour du changement climatique, des OGM, ou de la commercialisation du patrimoine génétique ne cessent de le souligner.  Un nombre important de pays dans le monde ont mis en place des programmes de conservation de semences indigènes, que ce soit in-situ (jardins botaniques ou associations à but non lucratif comme Kokopelli) ou ex-situ (collections de semences privées ou publiques, centres de recherche universitaires etc.).  Mais c’est lorsqu’on commence à raisonner dans le long terme que l’on s’aperçoit que la conservation des semences est un exercice qui peut être semé d’embuches.  Au cours des siècles, des collections entières ont été perdues ou détruites à la suite de conflits armés, d’incendies, de catastrophes naturelles, de la défaillance des équipements de conservation ou tout simplement par manque de financement privé ou public.  Il y a deux ans à peine,  l’Institut Vavilov en Russie (qui conserve plus de 400,000 espèces végétales) était menacé de disparition sous la pression de promoteurs immobiliers.  D’où l’importance peut-être de deux initiatives internationales assez récentes et dont on parle assez peu : la réserve mondiale de semences du Svalbard en Norvège (plus de 500 000 variétés)et le Millenium Seed Bank Project à Kew au Royaume Uni.

La réserve de semences du Svalbard (Svalbard Global Seed Vault en anglais)

© Svalbard Global Seed Vault/Mari Tefre

Au vu de l’entrée de cette « chambre forte » (traduction exacte de « Vault » en anglais) à l’architecture futuriste, on se croirait en pleine science-fiction.  Inaugurée en Février 2008, cette banque de semences à été construite à flanc de colline sur l’ile de Spitzberg (archipel du Svalbard, environ 850 km au nord des côtes norvégiennes et 1,000 km du Pôle Nord).  Elle contient trois salles de stockage situées au bout d’un couloir souterrain d’une centaine de mètres de long qui permettront à terme de stocker un maximum de 4.5 millions d’échantillons (de 100 à 500 graines) à une température moyenne de -18°C.  Ce sont les conditions climatiques (permafrost), géographiques (archipel isolé, terrain stable) voire politique (un pays scandinave politiquement stable) du Svalbard qui en font un lieu idéal pour la conservation de semences à long terme.  Ce projet a été presque entièrement financé par gouvernement norvégien.  La gestion du site est assurée par le Global Crop Diversity Trust (qui dépend de l’Organisation des Nations unies  pour l’alimentation et l’agriculture).  A noter que le GCDT est financé par des donations provenant de plusieurs organes gouvernementaux internationaux, de sociétés privées (Syngenta, DuPont/Pioneer) ou de fondations privées (Fondation Rockfeller, Fondation Bill & Melinda Gates).  A ce jour, la réserve stocke plus de 500,000 échantillons.

Le Millenium Seed Bank Project des jardins botaniques de Kew

© Royal Botanic Gardens Kew

Autre projet international de conservation de semences, le Millenium Seed Bank Project (« Banque de Semences du Millénaire » en français) a été initié en 1995 et inauguré officiellement en 2000.  Hébergé dans des bâtiments des jardins botaniques royaux de Kew (West Sussex, Royaume Uni), cette banque de semence stocke également des échantillons provenant du monde entier et les conserve à une température de -20°C.  Plus d’un milliard de graines y sont déjà stockées, provenant des collections de plus de 50 pays partenaires.  L’objectif principal du projet est de lutter contre l’extinction d’espèces végétales menacées.  Dès 2009, la banque contenait 10% de l’ensemble des variétés de plantes sauvages identifiées dans le monde. Elle espère atteindre 20% d’ici 2020.

Ces deux banques constituent donc une forme de contrat d’assurance contre la perte accidentelle de semences déjà conservées dans l’une des 1,400 banques de semences régionales dispersées dans plus de 100 pays dans le monde.  En effet, les échantillons conservés ex-situ sont des doubles de rechange, sont présent dans le pays d’origine et restent la propriété du pays dépositaire.  Selon les variétés, on fait également germer les semences à intervalles réguliers pour assurer la qualité optimale des variétés stockées.  Enfin, les semences sont mises à la disposition des organismes de recherche internationaux.