6 septembre 2008

Le ministère de l’énergie en Polynésie française vient de se fixer un objectif ambitieux pour les années à venir : cinquante pour cent de la consommation d’électricité assurée par des énergies renouvelables vers 2020. Ambitieux mais pas irréaliste : sur les 117 îles de ce territoire grand comme l’Europe - qui compte environ 260.000 habitants - isolé dans le Pacifique et fortement dépendant de l’extérieur pour ses approvisionnements, le solaire, l’hydraulique ou l’éolien ne produisent encore que 11,4% de l’énergie consommée. Il y a donc encore de la place pour l'installation d'équipements renouvelables sur un territoire maritime largement servi en soleil, vent et énergie de l'océan.

A l'heure actuelle, seules Tahiti et quelques îles marquisiennes ont véritablement investi dans l’hydraulique. A Tahiti, les barrages fournissent désormais 30% de la production. Mais les litiges fonciers limitent le développement de cette énergie dans les vallées. Les panneaux photovoltaïques commencent à séduire les particuliers, grâce à la défiscalisation, mais il faut encore plusieurs années pour amortir les frais d’investissement.

Parmi les projets les plus ambitieux, figure l’énergie thermique des mers, qui utilise la différence de température entre les eaux froides du fond de l’océan (moins de 4°) et les eaux chaudes de la surface sous les tropiques (environ 27°). Cette technique a déjà été mise en oeuvre pour la climatisation de l'Hotel Intercontinental de Bora Bora, construit en 2007. L'electricité produite ainsi pourrait fournir entre 10 et 40% des besoins de l’île de Tahiti. "50% d’énergies renouvelables en 2020, c’est possible, mais il faudra une vraie volonté politique pour rendre possible des investissements très lourds. Ce sont des choix de société plus que des choix techniques", a déclaré à l’AFP David Saouzanet, chef du service de l’énergie. La Polynésie serait la première à souffrir d’une pénurie mondiale de pétrole, n’étant pas située sur les grandes routes commerciales, souligne-t-il.

Pour Hervé Dubost-Martin, patron d’Electricité de Tahiti, "personne n’est capable de dire où en seront les prix du pétrole dans cinq ans. Il faut se préparer au scénario catastrophe".

D’autant que la consommation des particuliers augmente de 4% par an depuis 7 ans à Tahiti, et de plus de 8% dans les autres îles. Le ministère de l’Energie fait donc la chasse au gaspillage et soutient les nouveaux projets : normes bio-climatiques pour les habitations sociales, ferme éolienne sur l’île isolée de Makemo, centrale solaire à Makatea, qui assure déjà 70% des besoins en électricité.

Geneviève Piéroni, conseillère technique au ministère de l’énergie, mise sur "un large bouquet d’énergies renouvelables", comme la dendrothermie (utilisation de la biomasse), la géothermie.

Autres pistes : les moteurs à base d’huile de coprah et les hydroliennes, sorte d’éoliennes immergées dans les passes des atolls, où le courant est puissant. L’autre défi est celui du transport, les véhicules représentant en Polynésie 43% de la consommation de pétrole et de gaz.

L’importateur Alain Guitard souhaite développer le marché des voitures et des bus électriques et envisage même "des transports en commun maritimes électriques, pour résoudre à la fois le problème de la consommation et des bouchons de Papeete".

Pour atteindre son objectif, le service de l’énergie estime qu’il faudrait investir près de 1,1 milliard d’euros. Mais la Polynésie économiserait ainsi chaque année près de 60 millions d’euros en énergies fossiles.Le bénéfice serait aussi écologique : rien qu’à Tahiti, cela éviterait le rejet de 220.000 mètres cubes par an de gaz à effet de serre.

Source : Gouvernement / Outre Mer avec AFP