31 mai 2006

construction-bois.jpgUn bel exemple de collaboration fructueuse entre institutions et entreprises privées : après six années de recherche, les chercheurs de l’unité INRA-INPT-ENSIACET de Toulouse (Institut National de la Recherche Agronomique) et les équipes R&D de l’entreprise Lapeyre viennent d'annoncer la mise au point un traitement révolutionnaire pour le bois de construction. Ce traitement à coeur permet de remplacer certains procédés hautement toxiques par une "chimie verte", dont les composants viennent notamment de l'agriculture (Colza, Tournesol). Nous émettons toutefois un doute, de taille : si les cultures en question sont produites par des méthodes industrielles utilisant pesticides ou engrais à haute doses, on ne fait que déplacer le problème. Le communiqué de l'INRA ne fait pas mention de ces questions primordiales.

De par se composition (selon les espèces, de 40 à 50% de cellulose, 25 à 30% d’hémicellulose et 20% de lignine), le matériau bois est particulièrement sensible à l’humidité, aux champignons lignivores et aux insectes xylophages : la plupart des produits en bois - surtout à base de résineux couramment utilisés comme les pins- ont besoin d'être traités pour résister aux intempéries et autres agressions naturelles.

L'un des procédés couramment utilisé est l'autoclave, quichauffe le bois pour ouvrir ses pores et laisser ainsi entrer dans la matière le produit traitant. Mais ce procédé, largement utilisé dans l'industrie du bois, est hautement toxique. Le procédé Wood Protect®, breveté par Lapeyre et l’INPT, protège le bois à cœur contre les agressions extérieures tout en lui conférant une stabilité et une durée de vie inégalées. De plus, ce procédé utilise des réactifs naturels et non toxiques.
Les chercheurs ont développé un traitement à base d’anhydride mixte, un produit obtenu par réaction chimique entre des dérivés d’huiles de colza ou de tournesol (acides gras) et l’anhydride acétique. Ce produit agit par « greffage chimique» puisque l’anhydride mixte se fixe sur les fibres de cellulose. Le bois est ainsi protégé de l’humidité et des agressions extérieures et ne nécessite plus d’entretien.
L’imprégnation du bois par l’anhydride mixte se déroule en deux étapes : d’abord au sein d’un autoclave, où le vide et la pression permettent sa pénétration au cœur du bois, puis dans un bac où le bois est trempé dans un bain d’anhydride chauffé à 140°C pour favoriser le greffage du produit sur le bois.
Si la réaction d’hydrophobation du bois par estérification lipidique est connue depuis longtemps, l’agent utilisé jusqu’à présent était hautement toxique. Le défi pour les chercheurs était donc de réaliser le même type de réaction chimique en utilisant des produits naturels non polluants, issus de l’agriculture. L’anhydride mixte obtenu est donc un composé chimique « vert » dont la réaction sur le bois ne dégage aucun autre sous-produit toxique et s’avère entièrement recyclable.
Le traitement Wood Protect® est prévu pour les volets en bois de sapin auxquels il confère une protection semblable aux bois exotiques les plus résistants. Le bois traité présente une hydrophobicité importante. Ce traitement 100% naturel n’a aucune incidence néfaste sur la faune ou la flore et s’avère sans danger pour la manipulation par l’homme. Il confère au bois une protection dans le temps d’au moins dix ans.En terme d’utilisation industrielle, le bois traité ne subit aucune variation dimensionnelle et conserve ses propriétés mécaniques intactes. L’usinage du bois hydrophobé n’est pas non plus modifié. De plus, le traitement est totalement inodore, incolore et peut s’appliquer à toutes les essences de bois. La protection donnée par ce traitement nécessite cependant l’utilisation de produits de finition spécifiques. Ainsi, une nouvelle gamme de colles, patines, lasures a du être créée pour accompagner la commercialisation de ce bois traité.
Cette innovation pour le traitement naturel du bois intervient alors qu’un nouveau règlement européen REACH (enRegistrement, Évaluation, Autorisation des substances Chimiques), qui entre en application en 2008, va bientôt interdire les substances chimiques les plus toxiques. Ce règlement vise à mieux contrôler l’utilisation des produits chimiques en industrie et chez l’utilisateur final, ainsi qu’à réduire les risques environnementaux associés.Plus largement, ces travaux reflètent la volonté d’accentuer les recherches dans le domaine de la « chimie verte ». Il s’agit de répondre aux questions de raréfaction du carbone fossile en profitant des biotechnologies vertes et blanches dans le domaine des productions agricoles, en substituant la chimie du carbone fossile (pétrochimie) par celle du carbone renouvelable (chimie des agroressources). L’objectif étant de développer des procédés chimiques sobres et propres utilisant des matières naturelles pour réduire, voire éliminer à termes, les substances chimiques dangereuses pour la santé et l’environnement.