2 mars 2023

Elle porte le nom d'une bière irlandaise, mais elle est américaine. Née au Kansas en 1884 dans une famille Quaker, descendant des protestants anglais venus s'installer aux Etats-Unis à la fin du XVIIe siècle, Ruth Stout passe une grande partie de sa vie en ville, à New York, avant de déménager à presque 50 ans à la campagne avec son mari, dans le Connecticut. Lui s’adonne au tournage sur bois, elle se lance dans le jardinage. De façon tout à fait conventionnelle d’abord. Mais un jour, elle décide de ne plus bêcher son terrain !

Et là Surprise, ça marche.

Elle sème directement les graines qu’elle recouvre des matières organiques qui lui tombent sous la main, comme du vieux foin en train de pourrir. Elle perfectionne sa technique au fil des années, et finit par installer dans son jardin un paillis épais et permanent. Les résultats sont surprenants : sans travail du sol ni traitements, son potager produit fruits et légumes en abondance. À 77 ans, Ruth Stout, une femme non scientifique, révolutionne le jardinage biologique et démocratise la technique du mulch, en donnant des conférences à travers les États-Unis et en publiant .

Mise au point dans les années 1950, la « méthode Stout » est une référence toujours d’actualité dans le jardinage bio. Cette pratique écologique innovante permet de gagner du temps et de l’argent en écartant les techniques à la mode aujourd’hui qui demandent de nombreux investissements. C’est aussi une philosophie de vie tout à fait pertinente pour un jardinier du xxie siècle, soucieux de devenir plus autonome à l’heure où l’inflation et les pénuries alimentaires feront partie de notre quotidien.

Ruth Stout, une pionnière en avance sur son temps

la méthode Stout devance Didier Helmstetter et son Potager du paresseux de plus de 50 ans. Ruth Stout s’inscrit dans la lignée des quelques grands maîtres qui ont révolutionné le jardinage bio dans le monde comme les Australiens Bill Mollison et David Holmgren et le Japonais Masanobu Fukuoka.

Une méthode efficace pour une autonomie alimentaire qui répond à l’inflation et aux pénuries

grâce au mulch, un paillis de foin épais et permanent installé au potager, finis les buttes et les carrés, le binage et le compost, ou même les engrais et autres traitements. Le foin bloque le développement des adventices, fertilise le sol lors de sa décomposition, et nourrit les organismes vivants qui en retour améliorent la terre. Il protège aussi les réserves en eau et empêche le choc des gouttes d’eau de tasser le sol s’il n’était pas couvert. Le jardinage est ainsi débarrassé de la plupart des corvées, des accessoires, des produits ou des outils qui y sont habituellement associés et représentent des contraintes physiques et financières, tout en obtenant des résultats étonnants.

Des conseils concrets et des indications pratiques par fruit, par légume ou par fleur

Faire un plan de son potager pendant les soirées d'hiver,  prévoir les  semis de maïs, courges, haricots, soja, laitues, carottes ; comment cultiver des asperges sans creuser des tranchées ni les butter ; comment produire pommes de terre ou oignons en les posant simplement sur la terre et en recouvrant de foin ; comment lutter contre le chiendent, gérer les oiseaux qui mangent tous vos fruits (jusquà 5 fois leur propre poids tous les jours, selon l'auteur)… Un livre grand public sans aucun développement scientifique qui pourrait rebuter certains lecteurs.

Un style unique et incarné

assez caustique, parfois ironique, Ruth Stout n’esquive pas les controverses et contredit avec verve les idées reçues… qui sont toujours les mêmes qu’il y a 50 ans (pour un potager productif, il faut travailler la terre et soigneusement la préparer ; il faut biner, traiter, fertiliser…). Avec humour, elle intègre aussi ses échanges et désaccords avec d’autres jardiniers, pour un moment de lecture vivant et réjouissant.

 

Voir aussi : interview de Didier Hellmstetter qui préface le livre, dans l'émission de  de Claudine Castelnau sur Fréquence Protestante