24 août 2006

Plus con tu meurs. Le pauvre petit spéciforme, communément appelé thon rouge, dont raffolent les japonais, n'en demandait pas tant : ne vaut-il pas mieux laisser l'espèce s'éteindre tranquillement tandis que s'enrichissent confortablement quelques dizaines d'armateurs qui ont tant investi pour "nourrir leurs enfants" ? Il existe pourtant de nombreuses façons de pratiquer son métier en tenant compte d'évidences incontestables, comme par exemple le font quotidiennement les pêcheurs de ligne, en Bretagne. Ceux là connaissent la règle élémentaire de la préservation des resources, non seulement pour sauvegarder l'avenir de leur métier, (qui sera peut-être celui de leurs enfants s'il reste assez de poisson), mais aussi par simple respect de la nature. En comparaison, l'épisode de l'abordage du Rainbow Warrior II, de l'association Greenpeace, ce matin, par des marins de la pêche industrielle au large de Marseille, révèle des comportements plus que lamentables. Déni de la réalité, brutalité basique, censure, les thoniers-senneurs, en trépignant autour d'un voilier pacifique, ont finalement offert à leur adversaire une publicité gratuite. A l'origine de ce remue-ménage, Mourad Kahoul, président du Syndicat des thoniers de la Méditerranée, conseiller municipal UMP de Marseille, est surement très fier de ses troupes .

Rappel des faits : le Rainbow Warrior, de l'organisation écologiste Greenpeace, avait prévu d'amarrer son bateau à Marseille, mardi et mercredi, comme il l'a déjà fait, sans problème, à Barcelone (Espagne) ou à Gênes (Italie), afin d'informer le public et les professionnels sur les dangers qui pèsent sur l'environnement de la Méditerranée: sur-pêche conduisant à l'amenuisement des ressources, bétonnage des côtes... Forcément, les parrains du milieu marseillais de la pêche industrielle n'ont pas aprécié cette intrusion dans le business du thon ( 27,5 millions d'euros d'investissement en moins de 10 ans- dont 2,5 millions apportés par la région Languedoc-Roussillon). Quelques démarches ont abouti à une première décision préfectorale d'interdir l'accès du Vieux Port au Rainbow Warrior : le voilier s'est donc ancré, avant-hier (mardi 22 aout), au large de Marseille, tandis que les médias commençaient à s'intéresser à l'affaire.

Mais la mise en place d'une campagne d'information, telle que Greenpeace le prévoyait, ne pouvait laisser insensibles les pauvres pêcheurs qui doivent "nourrir leur famille" (5 millions d'euros par navire). La réponse ne s'est pas fait attendre, pas vraiment sur le registre de la discussion contradictoire. Au delà du coup de force (encerclement du bateau de Greenpeace par les thonnier, abordage), les paroles relevées par Libération parmi les marins de Marseille donnent une idée du niveau du débat : " bande de tarés fumeurs de joints [...] la pisse verte [...] S'il faut monter à bord et tout casser, pas de souci ! [...] ramassis de propagandistes médiatiques ..."
S'il est vrai que la pêche française est en théorie l'une des mieux contrôllée de la Méditerranée par le biais des quotas, pourquoi alors les thonniers ont-ils choisi de s'en prendre à un simple organe d'information, qui ne vise nullement à les empêcher de travailler ? Peut-être la réponse vient-elle de l'intérieur, telle que nous le rapporte Greenpeace : "La réponse est venue du capitaine de l’un des Jean-Marie Christian: les quotas on les dépasse, on essaie de gagner notre vie, pour faire une bonne saison, pour payer les bateaux."

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