12 février 2008

Pendant que la France encaisse les derniers tressaillements du Grenelle de l'Environnement, qui peu à peu rend aux pouvoirs quotidiens la place croissante qu'ils s'octroient, c'est en Guyane qu'étaient récemment annoncées de nouvelles mesures de protection de la forêt amazonienne située sur le "territoire français".

"Si quelques irréductibles n'ont pas compris que la Guyane c'est la France, et que la France on la respecte, nous allons le leur faire comprendre. La terre de Guyane ne sera plus violée impunément".

Mélange d'autoritarisme et de mièvreries : si l'homme comme à son habitude ne mégote pas sur les mots et expressions choc, N. Sarkozy, en voyage sur place a plaidé pour la terre, en défaveur d'opérations minières, notamment sur les resource en or de la région. Voilà un beau revirement de situation, un an après la pathétique lettre envoyée à Chirac par les peuples Wayana et Tako, natifs du coin.

C'est maintenant au niveau légal, appuyé par une force militaire de 1000 hommes supplémentaires, que pourra se jouer la protection des terres forestières : une modification du code minier, du code des douanes et du code de procédure pénale viennent renforcer l'arsenal juridique contre les clandestins orpailleurs. En effet, selon les statistiques officielles, il sont 3 000 en Guyane. Les associations avancent des chiffres plus inquiétants, de l'ordre de 8 000 personnes. Cet orpaillage sauvage est à l'origine d'un désastre écologique dans la forêt amazonienne : Les garimpeiros déversent dans les cours d'eau des boues résiduelles, du carburant et surtout du mercure, utilisé pour agglomérer les particules d'or, métal qu l'on retrouve le long de la chaîne alimentaire jusqu'à l'homme. Selon des études de la Direction générale de la santé, plus de 70 % des enfants amérindiens Wayana du Haut-Maroni présenteraient des concentrations de métal supérieures aux normes de l'OMS, liées à la consommation de poissons du fleuve.

Le WWF, qui a organisé un survol de sites témoins, le 10 février, avec la députée Christiane Taubira (Walwari, app. PRG), estime à 500 le nombre de chantiers. "Les camps sont plus discrets et plus petits, estime Laurent Kelle, représentant du WWF en Guyane. On peut avoir l'impression que leur nombre diminue, mais en réalité, on assiste à un éparpillement." Pour Mme Taubira, "la situation ne peut que s'aggraver, l'or ayant atteint un niveau historique". La députée souhaite que l'on s'attaque en priorité aux filières d'approvisionnement des orpailleurs en matériel et carburant.

En 2007, la gendarmerie a mené 113 opérations "Anaconda" contre les orpailleurs clandestins. Elles ont permis la destruction de matériel pour une valeur de 23 millions d'euros, la saisie de 12 kg d'or et de 71 kg de mercure. Petits chiffres en comparaison des 10 tonnes d'or extraites chaque année illégalement en Guyane, contre à peine 3 dûment déclarées.

Lundi 11 février, M. Sarkozy a justifié son refus d'ouvrir une mine d'or à ciel ouvert, qui aurait été exploitée par la société canadienne Iamgold, sur le site de la montagne de Kaw, au sud-est de Cayenne : "Si nous avions laissé ce projet se faire, a-t-il déclaré, nous aurions porté atteinte, de façon irrémédiable, à un patrimoine naturel considéré comme unique."

Sources :  Le Monde, Libération, et AFP