26 janvier 2007
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On le sait, l'espoir automobile passe par les biocarburants, issus de l'agriculture. Encore faut-il que cette dernière puisse fonctionner de manière autonome, sans recours intensif aux machines (tracteurs, moissonneuses), intrants (engrais), et autres composants de la chimie fossile (pesticides). Ce qui implique évidemment une conversion massive des pratiques actuelles : c'est la raison du doute fondamental qu'émettent de nombreux spécialistes de la question, dont Jean Marc Jancovici, qui préfère mettre le paquet sur le recours au nucléaire. Loin de vouloir entrer dans ce débat, nous préfèrons relater une dépêche de l'ambassade de France aux USA, qui détaille les résultats de recherche sur l'exploitation de la biodiversité, au lieu de sa négation. Des chercheurs de l'Université du Minnesota, Saint Paul ont en effet réussi à démontrer qu'une source potentielle très prometteuse de biocarburants aux Etats-Unis réside dans des cultures de type prairie, à forte biodiversité, établies sur des sols peu fertiles ou dégradés, qui ne nécessitent que peu d'apport d'engrais et de traitements chimiques. On ne peut regretter que cette manie de vouloir donner un jargon scientifique à ce qui relève plutot de bon sens hérité de pratiques ancestrales et plutôt pragmatiques : nos très sérieux chercheurs ont décidé d'inventer pour ces pratiques le terme "Low Input-High Diversity (LIHD)" (faibles intrants, haute diversité). Une bien étrange façon de nommer un retour salvateur vers les racines de l'agriculture...
L'étude a porté sur 152 parcelles plantées en 1994 dans des sols dégradés de Cedar Creek dans le Minnesota et suivies chaque année depuis. Pour étudier l'effet de la biodiversité les parcelles ont été plantées avec 1, 2, 4, 8 ou 16 espèces herbacées pérennes, sans engrais, et irriguées seulement au début de l'expérience. La biomasse produite chaque année est mesurée début Août après brûlage à la fin de l'hiver.
L'effet de la biodiversité est manifeste: les parcelles ensemencées avec 16 espèces produisent 258% plus de biomasse que celles ayant reçu des monocultures, quelle que soit l'espèce.
Par des calculs complexes de rendements énergétiques (suivant les biocarburants produits avec la biomasse) les auteurs montrent que le gain net d'énergie par hectare obtenu avec les parcelles LIHD (à 16 espèces) est supérieur (de + 51%) à celui des cultures classiques -sur des sols fertiles de maïs- dont les grains sont utilisés pour fabriquer de l'éthanol. Par ailleurs, l'effet de ce type de cultures LIHD sur la séquestration du CO2 par les racines et le sol excède largement le CO2 émis pour la production du biocarburant à partir de ces parcelles (4,4 contre 0.32 Mg/ha/année).

Les biocarburants peuvent donc être produits avec des rendements (très) satisfaisants à partir de cultures robustes, demandant peu d'interventions, sur des sols pauvres ou dégradés souvent abandonnés par l'agriculture classique. Ceci est important aux Etats-Unis où la tendance était plutôt de convertir de nouvelles surfaces à la culture intensive au détriment de la production d'autres plantes alimentaires et de la biodiversité.