2 octobre 2006

Alors qu'en France on émerge doucement d'une longue rêverie, et que le gouvernement se met à entrevoir, se frottant les mains, une nouvelle source de revenus grâce aux taxes sur les biocarburants, les américains, de leur coté, ne nous ont pas attendu. La croissance du marché des biocarburants est en effet un créneau à intégrer pour les multinationales. Mais cette fois ci, ce ne sont pas les pétrolières qui se paieront la plus grosse part du gateau. Les chimiques sont à l'affut, avec leurs OGM magiques, censés remplacer la folie du pétrole, par la folie du maïs, du colza, bref de tout ce qui peut tirer de la terre le peu qui  lui reste de vivant, pour le transformer en huile, éthanol, bref en hydrocarbures "verts". Attention, danger.

C'est un bulletin du consulat de Chicago qui nous met la puce à l'oreille. L'état de l'Oklahoma, ancien état pétrolier,  spécialiste de la culture intensive, se tourne vers la production débridée de biocarburants. Le principe de précaution ? On verra plus tard.

La fabrication d'éthanol absorbant déjà plus de 13% de la production américaine de Maïs, les entreprises semencières y intensifient leurs efforts de recherche, soit pour améliorer les variétés de plantes déjà couramment utilisées (Maïs pour l'éthanol, Soja pour le biodiesel), soit pour mettre au point de nouvelles cultures énergétiques.

Ainsi, la firme Syngenta espère commercialiser dès 2008 une variété de maïs OGM synthétisant l'amylase, enzyme dégradant l'amidon en glucose. Une telle variété présenterait l'avantage de gagner une étape dans le processus industriel. Monsanto, leader des biotechnologies agricoles, affirme que l'essentiel de l'amélioration variétale pour les biocarburants sera fait par croisement conventionnel. Ainsi, ils screenent les variétés de Maïs connues, à la recherche de celles qui auront les meilleures propriétés pour la fabrication d'éthanol ; Pioneer Hi-Bred International suit la même démarche.

Dupont et Bunge ont quant à eux annoncé il y a quelques semaines que leur joint venture travaillant actuellement à l'amélioration du soja alimentaire allait commencer à développer des variétés de soja destinées spécifiquement à la transformation en biodiesel.

Mais l'éthanol cellulosique, c'est-à-dire l'utilisation de la biomasse au sens large (résidus de récoltes et cultures énergétiques dédiées) est la voie vers laquelle se tournent tous les espoirs ; les spécialistes estiment que la rentabilité économique de cette filière peut être atteinte avant 2012.

Ceres, filiale de Monsanto, travaille en utilisant les croisements conventionnels et les OGM sur une herbe naturelle des Grandes Plaines, le Panic érigé (panicum virgatum ou switch grass). Le Panic ne nécessite ni fertilisant, ni irrigation et représente donc un immense capital énergétique dans la mesure où cette herbe se développe facilement et peut atteindre des rendements de 20 quintaux/hec. Mendel Biotechnology, basé à Hayward, Californie, étudie une variété d'herbe provenant de Chine, le Miscanthus ; les rendements pourraient atteindre cette fois les 50 quintaux/hec.

Enfin, le dernier candidat pour la fabrication d'éthanol cellulosique serait le Peuplier, premier arbre entièrement séquencé et sur lequel le Department of Energy travaille à l'heure actuelle, en essayant d'abaisser sa teneur en lignine.

Toutes ces nouvelles possibilités agronomiques ne vont pas sans rencontrer une certaine réticence de la part des mouvements écologiques qui émettent des réserves face à ces nouvelles pratiques qui fragilisent les plantes et multiplie les risques de contamination par pollinisation croisée (en particulier avec les cultures pérennes). D'autres redoutent que ce nouveau débouché énergétique pousse les agriculteurs à arrêter les rotations pour ne faire qu'une seule culture, ce qui multiplierait les risques de développement de maladies et de parasites et appauvrirait les sols. La question reste donc de savoir si la menace de dépendance énergétique justifie ces prises de risque puisque les 'OGM énergétiques' trouvés pour l'instant n'améliorent que de 2 à 5% la production d'éthanol. Il y a cependant fort à parier que les réticences du grand public diminuent à mesure que le prix de l'essence d'envole.

Cette information est un extrait du BE Etats-Unis numéro 47 du 14/09/2006 rédigé par l'Ambassade de France aux Etats-Unis. Les Bulletins Electroniques (BE) sont un service ADIT et sont accessibles gratuitement sur www.bulletins-electroniques.com