27 septembre 2006

epidemais.jpgQu'y a-t-il de commun entre un ancien champion de Formule1 et un champ de betteraves ? L'annonce a finalement été faite hier par Thierry Breton, ministre de l'Economie. Après avoir dévoilé à Christine Ockrent son intention de développer des mesures en faveur des biocarburants, spécifiquement le E85 (85% d'éthanol, 15% d'essence), Thierry Breton a précisé les modalités de l'action du gouvernement, notamment le prix de vente à la pompe, après avoir longuement discuté avec Alain Prost, ancien champion automobile qui avait la charge d'une étude sur le sujet. Ce dernier était l'invité de Marie Drucker sur la 3 hier soir après avoir remis son plan au ministre, dont la mesure phare est la mise en place de 500 pompes à éthanol d'ici la fin de l'année 2007 dans toute la France. Voilà un plan médiatique bien ficelé.

Car l'annonce est censée flatter les agriculteurs : en offrant des nouveaux débouchés à cette profession toujours en crise, la perspective de transformation du parc automobile français redonne du coeur à l'ouvrage à une profession en quête d'identité depuis de longues années que le système subventionné de la PAC soutient péniblement les 600 000 agriculteurs de France. En effet la production d'éthanol sera française : canne à sucre, betterave à sucre, colza. Selon le rapport d'Alain Prost, le volume des exportations de la France en céréales et en sucre de betterave représenterait déjà l'équivalent de «70 % des besoins annuels d'essence pour les voitures particulières». Quant au réseau de distribution, il serait en place : l'aménagement d'une pompe flexfuel ne coûtera qu'entre 20 000 et 40 000 euros en travaux à une station-service. Coté parc de véhicules, les modifications seront peu importantes, de l'ordre de 200 euros par véhicule fonctionnant à l'essence.
Mais évidemment, la question qui s'est posée depuis que l'idée des biocarburants existe reste la même : l'intensification de l'agriculture arrivera-t-elle à produire assez de carburant pour tout le monde, sans innonder nos rivières des pesticides et engrais nécéssaires à la croissance du végétal ? La production de nourriture ne sera-t-elle pas affectée ? Jean-Marc Jancovici, expert énergétique, nous rappele à la raison : la consommation mondiale de biocarburants représente aujourd'hui 15 millions de tonnes équivalent pétrole par an, alors que la consommation mondiale dudit pétrole est de 3 500 millions de tonnes par an. «Les biocarburants sont donc un intéressant problème de politique agricole, mais un élément négligeable d'une politique énergétique», dit-il.

Voilà en tous les cas, enfin, une belle initiative de la part d'un gouvernement qui s'est trop concentré sur ses luttes internes, malgré les déclarations tonitruantes du chef à Johannesbourg (2 septembre 2002) : "La maison brûle, et nous regardons ailleurs".

La solution, en matière de transport, est donc toujours la même depuis que le problème existe : décroissance et diversification.