7 mai 2007
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Un programme de l'Agence Nationale de la Recherche sur un complément au pétrole vient d'être lancé, avec l'objectif d'utiliser une micro algue servant de biocarburant à très haut rendement. A l'Observatoire Océanographique de Villefranche-sur-mer et celui de l'INRIA de Sophia Antipolis, près de Nice, comme dans cinq autres centres en France, le défi a commencé.


Le carburant du futur viendra-t-il de la mer ? Après le maïs, le colza, le tournesol et la canne à sucre, les microalgues marines et l'eau douce pourraient servir à produire du biocarburant comme suppléant du pétrole. Ce projet est à l'initiative d'Olivier Bernard, chercheur du projet COMORE de l'INRIA de Nice-Sophia Antipolis, dans le cadre d'un programme labellisé par les pôles de compétitivité Mer et CapEnergie de la région Paca. Depuis décembre 2006, sept organismes publics et un privé se sont lancés dans la course. "Certaines espèces d'algues microscopiques produisent par photosynthèse des réserves de lipides pouvant aller jusqu'à 60% de leur masse", explique Antoine Sciandra, directeur de recherche au CNRS, "une culture à grande échelle de ces cellules est susceptible d'offrir un rendement à l'hectare trente fois supérieur à celui du colza ou au tournesol, avec un impact favorable sur l'environnement, et ceci toute l'année". Une perspective qui conduit le Programme National pour la Recherche en Biotechnologies (PNRB), via l'Agence Nationale de la Recherche (ANR), à financer un projet sur trois ans, baptisé Shamash, dont le coût consolidé atteint trois millions d'euros. A charge pour les chercheurs de trouver parmi les centaines de milliers d'espèces existantes, la microalgue "de course" qui produira le plus de substitut de pétrole et que l'on pourra élever en bassin.

"Ce projet intègre toutes les étapes depuis la physiologie des microalgues jusqu'à la combustion des lipides extraits. Notre but au départ, avec nos partenaires biologistes, motoristes et économistes, est de démontrer la faisabilité et la crédibilité du projet", tempère Antoine Sciandra, " vous savez, à l'origine, M. Diesel a conçu son moteur pour fonctionner avec de l'huile de palme, puis l’arrivée du gasoil ayant changé la donne économique, son moteur a dû être adapté. Il faudrait faire l’inverse aujourd’hui. "

M. Diesel comptait utiliser l’huile de Palme

Ce projet a l’ambition de générer le moins de pollution possible, en instituant le principe de recyclage. D’une part, la production de d’algues en bassin permet la récupération et le recyclage de substances minérales néfastes pour l’environnement. D’autre part, "Nous avons imaginé de coupler des stations de production d’algues avec des stations de production de carbone (usines, centrales électriques…) afin de recycler les émissions de dioxyde de carbone grâce à l'énergie solaire " , poursuit Antoine Sciandra.

La rentabilité est l’autre préoccupation de ce programme. A l’heure actuelle, le litre de carburant d’algue coûte plus cher que le pétrole. Mais plusieurs éléments permettent d’espérer obtenir, à terme, une bien meilleure rentabilité. Car les microalgues n’intéressent pas uniquement les producteurs d’énergie de substitution. Certaines d'entre-elles contiennent, en effet, des molécules à haute valeur ajoutée, comme les oméga trois et les antioxydants, qui sont très recherchées dans le domaine de l’agro-alimentaire, de la pharmacologie et de la cosmétique. " En améliorant les procédés de séparation des différentes molécules et en stimulant les microalgues selon certains procédés, on pourrait faire de la coproduction et diviser les coûts ", estime le directeur de recherche au CNRS.La vente en station service n’est certes pas encore tout à fait pour demain, mais d’ici 2010, les labos français partenaires du projet Shamash devraient avoir produit les premières dizaines de litres d’essence d’algues.