30 avril 2006

Centrale thermique d'Avedore, au DanemarkPlusieurs quotidiens ont relayé l'info : le dioxyde de carbone n'a plus la cote à Powernext Carbon, bourse d'échange pour les industriels européens astreints à limiter leurs émissions dans le cadre du Protocole de Kyoto. Rappelons que le protocole permet aux riches pollueurs de dépasser leur quota en achetant leur droit à polluer sous forme de  tonnes de CO2 excédentaires, vendus par d'autres industriels vertueux, qui sont alors récompensés pour leurs efforts de réduction des émissions. Ce processus devait permettre de réduire les émissions dan l'atmosphère de  l'un des six gaz à effet de serre responsable du réchauffement climatique.

Mais ce vendredi 26 avril 2006, quelquechose ne tourne pas rond : la tonne de CO2 perd subitement 35% de sa valeur. La raison principale devrait nous réjouir : l'annonce récente de six pays de l'Union Européenne, bons élèves,  est porteuse d'espoir puisque les quotas des PNAQ (Plans nationaux d'allocations de quotas, mis en place depuis début 2005 et validés par la Commission européenne) n'ont pas été atteint en France, la République tchèque, les Pays-Bas, l'Estonie, la Belgique et l'Espagne.

En clair, ces pays ont rejetté moins de CO2 que prévu. En Europe, ces quotas s'appliquent à  11 500 sites "pollueurs", dont 1126 pour la France (centrales thermiques, raffineries, sidérurgistes, cimentiers et autres chimistes). Les commentateurs se plaisent à évoquer un comportement vertueux, qui prouverait alors l'efficacité du protocole de Kyoto et du système de bourse d'échange pour réguler les émissions.

Il faut bien sur se méfier des interprétations trop rapides : être en deça des quotas ne signifie aucunement que les émissions ont baissé. Cela signifie qu'elles sont inférieures aux prévisions, par exemple de 11% pour la France.

Problème, évoqué dans un article du Figaro de ce jour : si le cours du CO2 baisse durablement, alors les avantages qu'un CO2 cher donnait aux entreprises peu émettrices, soucieuses de l'environnement, risquent d'être diminués. De même, certaines entreprises de secteurs peu polluants (énergies renouvelables, par exemple), ont déjà intégré dans leur plan comptable prévisionnel les bénéfices qu'ils pourraient tirer de la vente de tonnes de CO2. On comprend donc qu'un CO2 pas cher les désavantagera.

Mais encore une fois, cet évenement n'est peut être qu'un épisode. Un article de la Tribune, daté de juillet 2005, mettait en évidence un facteur de regain sur les cours du CO2 : le prix des énergies fossiles, en constante croissance depuis le début du choc  de 2005, joue en faveur de la "bourse des pollueurs"  : les industriels avaient peur de l'avenir et prévoient d'être obligés de polluer en brulant par exemple, du charbon. De ce coté là, pas d'inquiétude : le pétrole et le gaz  se raréfient, ce qui laisse envisager de l'espoir pour le charbon, et donc peut-être pour le prix du CO2.

C'est donc cet aspect psychologique qui est probablement le meilleur atout du Protocole de Kyoto qui a donné naissance à ce marché du carbone : on voit maintenant que les industriels savent qu'ils auront, un jour ou l'autre, à payer pour les dégats qu'ils occasionnent.

 Sources :